Pour cette nouvelle exploration sous-marine en snorkeling je vous emmène à la découverte des fonds marins de Perama, sur l'île grecque de Corfou où j'ai eu la chance de séjourner quelques jours. Cette île est située en mer ionienne, au large des côtes de l’Épire et de l'Albanie. La faune sous-marine de Corfou est avant tout celle de Méditerranée, mais comme on commence à s'approcher un peu du bassin oriental de la grande bleue il est également possible d'y croiser quelques espèces exotiques invasives provenant de mer Rouge et qui se sont acclimatées aux eaux de plus en plus chaudes du littoral européen. Cette plongée risque donc de me réserver quelques surprises.

Aujourd'hui je vais visiter les fonds situés sur la côte rocheuse du village de Perama, à quelques kilomètres seulement de l'aéroport et de Kerkyra, la capitale de l'île de Corfou. Depuis le bord de mer et de la chambre de l'hôtel Oasis où je réside, la vue est réellement splendide, ici l'eau est tellement transparente que je distingue sans peine les zones d'herbiers de posidonie, les blocs rocheux immergés et les bancs de sable clair. C'est un véritable tableau coloré que la nature a composé dans cette petite baie, un vrai plaisir pour les yeux.

Il est temps de me mettre à l'eau. La mer est calme, il n'y a pas de vent et la baignade est agréable car la Méditerranée est à 20°C. Sinon je suis agréablement surpris par le nombre de poissons que je croise, les espèces les plus communes de Méditerranée y sont largement représentées : sars, saupes, mulets, crénilabres et girelles notamment. Il faut dire que cette partie de la baie est entourée d'hôtels ce qui donne l'impression que cet espace littoral est surtout réservé à la baignade, en tout cas je n'y ai rencontré aucun pêcheurs ou chasseurs.

Ci-dessus une girelle commune femelle (Coris julis) et ci dessous un jeune sar commun (Diplodus sargus sargus).

Je remarque notamment que ce spot abrite un belle population de serrans écriture (serranus scriba), ils sont nombreux aux abords des herbiers et parmi les rochers.

Comme à mon habitude je ne manque pas d'explorer l'envers des blocs rocheux, j'y découvre pas mal d'éponges dont cette grande éponge pierre (Petrosia ficiformis) très ramifiée. Elle est bien reconnaissable à sa structure lobée et sa coloration lie-de-vin qui est due à la présence d'une cyanobactérie photosynthétique qui vit dans les tissus superficiels de l'éponge.

Dans une autre petite cavité je repère un concombre cracheur marron (Holothuria sanctori), voilà mon premier immigré des mers chaudes ! Mais cette holothurie n'est pas une découverte pour moi car elle est aussi arrivée sur notre littoral français il y a quelques années et je l'ai déjà rencontré à maintes reprises.

Non loin du concombre de mer, dans un recoin caché de la petite cavité, je fais ma première observation d'espèce rare. Voici une jolie porcelaine livide (Luria lurida) que l'on croise rarement car elle a été victime d'une collecte abusive dans le passé, en particulier pour l'esthétique de sa coquille. Notons que cet élégant mollusque est aujourd'hui strictement protégé par la convention de Berne en Méditerranée afin de reconstituer sa population.

Revoilà un serran écriture (serranus scriba), il y en a vraiment plein par ici !

Puis, en passant dans un massif touffu de posidonie je surprends une belle rascasse brune (scorpaena porcus) qui s'est cachée dans la pénombre et qui attend patiemment la nuit pour partir chasser.

Alors que je serpente entre les rochers je remarque la présence d'un ver très coloré installé parmi les algues. Voilà mon second immigré des mers tropicales : Le ver de feu (Hermodice carunculata) ! Cette espèce est inédite pour moi car elle n'est pas encore arrivée chez nous. Le ver de feu est très esthétique mais je ne suis pas franchement pressé de le voir débarquer sur nos côtes car ses soies sont particulièrement urticantes !

Un nouveau serran écriture (serranus scriba) me surveille du coin de l’œil pendant que je photographie le ver de feu. Je dois être sur son territoire ...

Je continue ma boucle et me dirige en direction du ponton de l'hôtel Oasis. Sur le trajet je me faufile entre de beaux herbiers de posidonie qui abritent de nombreux sparaillons (Diplodus annularis). Ces poissons ressemblent beaucoup aux sars communs mais on l'observateur attentif les reconnaîtra grace aux reflets jaunes présents sur leur tête et leurs nageoires.

A la lisière entre les herbiers et une langue sablonneuse et détritique j'observe un très beau marbré (Lithognatus mormyrus). Il a une belle taille, mais il est très vif et difficile à approcher.

De l'autre coté du ponton j'aboutis dans une petite crique remplie de rochers.

J'y débusque une belle blennie palmicorne (Parablennius sanguinolentus) qui s'affole à mon approche. Cette espèce végétarienne se nourrit d'algues qui poussent sur les rochers du bord de mer.

Un peu plus loin j'observe l'agitation frénétique d'un crénilabre ocellé (symphodus ocellatus) mâle qui est en pleine période de reproduction. Il présente une magnifique livrée de reproduction qui comporte un ocelle très coloré sur la tempe.

Il multiplie les va et vient pour construire patiemment son nid d'algues et attirer les femelles.

Il faut être prudent quand on évolue entre les rochers et surtout il ne faut pas poser ses mains n'importe où car ici aussi je repère des vers de feu ! Heureusement ces derniers ont une bonne taille et une coloration vive, on les distingue assez facilement.

En fouinant je finis par tomber sur une toute petite grotte semi immergée. Évidemment je ne résiste pas à y jeter un coup d’œil et devinez quoi, je suis accueilli par un serran écriture, un de plus !

Sur la paroi ombragée de la grotte je fais une découverte un peu plus originale : un petit violet (Pyura dura). Il s'agit d'une ascidie, un organisme filtreur qui se nourrit de particules organiques en suspension dans l'eau.

Il existe plusieurs espèces de violets, celle-ci se caractérise par ses siphons rose-rouge présentant des marques blanc-bleuté nacrées. 

En m'éloignant du bord je retrouve de beaux herbiers de posidonie où évoluent de nombreux poissons. En les observant mon regard est soudainement attiré par un spécimen de belle taille dont le corps est très allongé. J'ai d'abord cru à une orphie, mais son museau n'est pas assez fin et pointu pour que çà en soit une.

En fait il s'agit d'une bécune à bouche jaune (Sphyraena viridensis), un barracuda de Méditerranée ! J'ai déjà observé des individus juvéniles mais celui là est plutôt de belle taille, je suis impressionné par cette rencontre. Je tente de nager sur une trajectoire parallèle à la sienne pour ne pas trop l'effrayer car je sens clairement qu'il n'a pas envie que je l'approche.

Et je ne tarde pas à le laisser tranquille car une carangue passe soudainement devant moi et focalise totalement mon attention ! Je vais de surprise en surprise ! Ce poisson évolue rapidement dans l'eau, il m'est compliqué de l'approcher. D'après son aspect général, et notamment la tache noire sur l'opercule qui est bordée d'une tache brillante, je dirais qu'il s'agit d'une jeune carangue coubali (Caranx crysos). Malheureusement elle trace son chemin comme une fusée et je la perds sans avoir le temps de vraiment apprécier cette rencontre rare.

Après le concombre cracheur marron et le ver de feu, voici mon troisième immigré des mers chaudes en provenance de la Mer Rouge : Le poisson lapin à ventre strié (Siganus rivulatus). Alors celui-là je ne l'ai pas vu arriver ! J'étais tranquillement en train de flotter au dessus d'un herbier de posidonies et j'observais un crénilabre à queue noire (Symphodus Melanocercus) offrir ses services de déparasitage à tout un tas de poissons quand ce fut son tour de se faire inspecter. J'ai d'abord cru à une saupe, mais avec ses yeux placés haut sur la tête et son museau pointu ce poisson lapin n'a pas fait illusion longtemps. C'est toujours un plaisir pour un amateur de faune sous-marine d'observer une nouvelle espèce de poisson inédite, mais pour les biologistes l'envahissement progressif de la Méditerranée par le poisson lapin est une catastrophe car il est très vorace et prive les espèces autochtones de leurs ressources en algues et en posidonies. Notons que même s'il n'est pas officiellement implanté sur le littoral français deux spécimens ont déjà été pêchés au large de Sausset les Pins (près de Marseille) en 2009 ! A la faveur du réchauffement climatique sa vitesse d'expansion vers l'ouest de la Méditerranée est fulgurante ...

 

Un très grand rocher situé à proximité du bord attire mon attention, il me semble qu'il comporte un grand creux ombragé que je ne manque pas d'aller visiter en apnée. 

Au pied du grand rocher, vers trois mètres de profondeur je remarque une grande étoile de mer rouge (Echinaster sepositus) qui déambule lentement sur le gravier.

En retournant vers le bord de mer je nage au dessus d'une grande étendue de sable. Même si ces zones paraissent toujours désertiques et sans intérêts il faut bien ouvrir l’œil, on peut parfois avoir de bonnes surprises. Aujourd'hui je n'y décèle rien de très original, mais à force de scruter le fond clair je finis quand même par débusquer un rombou (bothus podas) posé sur le fond vers 4 mètres de profondeur.

Je descends en apnée lui rendre visite et l'observer de plus prêt. D'après l'écartement important entre ses deux yeux il s'agit d'un mâle. Admirez à quel point il est bien camouflé dans son environnement !

Je suis bien content de cette première plongée à Corfou, ce spot de Perama au pied de l'hôtel Oasis a tenu ses promesses, il est assez poissonneux et j'ai eu droit à de belles observations. J'ai bien aimé ce mélange entre la faune Méditerranéenne classique et une faune plus exotique venue de l'Orient.

 

Après la plongée : Le monastère de Vlacherna et l'îlot de Pontikonissi

Dans le bras de mer qui sépare Perama de la presqu'île de Kanoni se trouve l'une des jolies curiosités pittoresques et photogéniques de Corfou : le monastère de Notre-Dame de Vlacherna.

Ce monastère orthodoxe blanchit à la chaux fut construit au 17ème siècle, il est situé sur un petit îlot relié à la terre ferme par une petite jetée.

 

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Baie de Perama à Corfou

Perama est un village balnéaire situé en mer Ionienne sur la côte est de l'île de Corfou, à quelques kilomètres seulement de l'aéroport et de Kerkyra, la capitale de l'île. Le littoral escarpé de Perama fait face aux côtes de l’Épire et de l'Albanie, il offre un environnement rocheux et boisé. Côté mer l'eau est tellement transparente qu'on distingue sans peine les zones d'herbiers de posidonie, les blocs rocheux immergés et les bancs de sable clair qui composent les fonds marins de cette localité. C'est un véritable tableau coloré que la nature à composé dans cette petite baie, un vrai plaisir pour les yeux.