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Début de "bloom" d'algues vertes dans l'étang de Berre
Retour à Touret de Vallier sur la côte martégale de l'étang de Berre en compagnie de mon ami François afin d'explorer ensemble la biodiversité de ce surprenant spot de plongée. L'étang de Berre est un milieu très changeant, la température et la salinité de l'eau pouvant varier sensiblement au fil du temps. Les espèces vivantes établies en ces lieux doivent montrer de grandes facultés d’adaptation pour s'y établir durablement. Compte tenu de ces paramètres, à chaque plongée dans l'étang, il est impossible de savoir à l'avance si la plongée a des chances d'être intéressante ou non.
En nous équipant, nous regardons le bord de mer depuis notre promontoire et nous constatons que l'étang est très verdâtre, il semble rempli d'algues alors que ce n'était pas le cas lors de ma précédente plongée effectuée au mois de mai. Le fond de l'étang est tapissé de laitues de mer (Ulva lactuca) et d'algues filamenteuses (des cladophores) au milieu desquelles je repère quelques petites colonies de zostères naines (zostera noltii), ces plantes précieuses que les syngnathes affectionnent. Les zostères jouent un rôle important dans l'étang, elles améliorent l’oxygénation et la transparence de l'eau. Le "bloom" des laitues de mer est dû à un apport important de nitrates provenant en grande partie des eaux de la centrale EDF de Saint-Chamas.
Cette prolifération d'algues et notamment de laitues de mer fait le bonheur des idotées baltiques (idotea balthica), les ulves étant la principale source de nourriture de ces petits crustacés.
En pleine eau se sont les méduses aurélies (aurelia aurita) qui pullulent, elles sont encore plus nombreuses qu'au mois de mai lorsque j'ai effectué ma dernière plongée dans l'étang de Berre.Ces méduses ont toujours été présentes dans l'étang de Berre, mais depuis l'été 2022 elles semblent beaucoup plus nombreuses qu'avant. A l'approche de l'été, la hausse de température de l'eau semble favoriser sa reproduction mais pour le moment les scientifiques n'ont pas assez de recul pour savoir si le phénomène est en lien avec le réchauffement climatique.
D'autres cnidaires vivent fixés au substrat, il s'agit des anémones. Elles sont assez nombreuses dans l'étang et il en existe plusieurs espèces. Voici une anémone verte (anemonia viridis) peu colorée.
Du côté des poissons, je note le retour des jolies blennies paon (salaria pavo). A ma dernière sortie je n'en avais pas observé, mais aujourd'hui elles sont nombreuses à être postées sur les rochers. Ces blennies sont bien adaptées à la vie en eaux saumâtres et l'étang de Berre en abrite toute une population.
Chez la blennie paon il y a un dimorphisme sexuel assez important, le mâle en livrée de reproduction se pare de couleurs vives et il arbore une grande crête sur la tête.
Sur la côte martégale de l'étang, il n'y a pas un rocher qui ne soit pas colonisé par les moules de Méditerranée (mytilus galloprovincialis) ! Elles sont présentes en très grand nombre sur le rivage jusqu'à Saint-Mitre les Remparts et Istres. Les colonies de moules semblent prospérer et perdurer depuis la diminution des rejets d'eau douce par la centrale EDF de Saint-Chamas.
Les coquilles des moules les plus ombragées sont recouvertes d'éponges, elles offrent de jolies compositions colorées pour les photographes sous-marins. Les deux espèces rencontrées sont l'halichondrie cierge (halichondria bowerbanki) et une éponge rose orangée qui reste à identifier.
François me fait signe, il a repéré un petit syngnathe caché dans un amas d'algues et de zostères. Il a débusqué un syngnathe de lagune (syngnathus abaster), mais nous avons beaucoup de difficulté pour le photographier à cause du mouvement incessant des algues qui l'entoure. De ce fait mon image n'est pas formidablement nette, mais comme c'est le seul syngnathe que nous avons trouvé aujourd'hui, je vous la propose quand même.
Le fond détritique de l'étang sert de territoire à différentes espèces de gobies. Je n'ai eu qu'une fraction de secondes pour photographier ce gobie géant (gobius cobitis) peu téméraire qui s'est sauvé à toute allure en me voyant.
Si le gobie géant se voit de loin, il en est tout autrement pour le petit gobie varié (pomatoschistus pictus) dont la livrée se confond parfaitement avec le fond.Le gobie varié se reconnaît assez facilement grace aux selles blanches présentes sur son dos et aux taches noires visibles sur ses flancs.
Continuons à explorer le bestiaire des gobidae de l'étang de Berre. En progressant vers la plage de Figuerolles en direction de l'ouest, je tombe ce coup-ci sur un gobie noir (gobius niger), une espèce bien adaptée aux eaux saumâtres et que j'observe à chacune de mes sorties à Touret de Vallier.
Le gobie noir mâle peut devenir très foncé, celui-ci est peut-être en phase transitoire vers une livrée de reproduction. Notez également comme sa première nageoire dorsale est pointue. Cette espèce est peu farouche et se laisse facilement tirer le portrait, c'est un bon sujet d'observation.
Sous un surplomb rocheux, je repère une nouvelle halichondrie cierge (halichondria bowerbanki) de teinte verdâtre. Cette éponge attire l'attention car elle se présente sous sa forme ramifiée avec des extensions en forme de branches.
Voilà deux nouvelles anémones vertes (anemonia viridis), plus petites que la précédente, mais bien plus colorées ! Cette espèce très commune sur l'ensemble de notre littoral avait disparu de l'étang durant les années noires de rejets industriels, mais elle semble désormais revenir en force. Petit à petit Berre retrouve sa biodiversité.L'étang de Berre est le lieu idéal pour observer le rapane veiné (rapana venosa), ce très gros mollusque gastéropode invasif provenant des mer de Chine et du Japon. Le rapane se nourrit de bivalves, il affectionne particulièrement les moules et les huîtres, autant dire qu'ici il est au paradis ! En voici deux en phase d'accouplement.
Le rapane se plaît tellement dans l'étant de Berre qu'il y prospère, j'en observe plusieurs à chaque sortie. Et vu les nombreuses pontes observées accrochées aux rochers je pense qu'il n'est pas prêt de disparaître ! Ce point est clairement à considérer pour un éventuel projet de réintroduction de l’huître plate dans l’étang,
Nous sommes sous l'eau depuis deux heures et franchement nous n'avons pas vu le temps passer. Sur le trajet qui nous ramène à Touret de Vallier, je photographie un dernier gobie noir (gobius niger) dont la livrée est plutôt claire, il s'agit probablement d'une femelle.
Tags : snorkeling dans l'étand de Berre, anémones de l'étand de Berre, gobies de l'étang de Berre, biodiversité de l'étang de Berre
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Commentaires
2chantalDimanche 23 Juin à 17:37Merci à tous les deux !
Pas de grosses surprises lors de cette sortie mais surveiller l'évolution de la biodiversité dans l'étang de Berre reste intéressant, on peut voir que certaines espèces se sont bien implantées dans ces lieux malgré l'instabilité du milieu. Je pense que si çà continue comme çà l'étang de Berre va redevenir un spot de snorkeling intéressant après des décennies de pollutions et de dégradations catastrophiques.
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Bonjour Laurent, toujours un plaisir de suivre tes sorties ... Merci pour ces belles photos