Voilà l'été, même si les vacances ne sont pas encore là le Soleil tape fort en ce moment et l'envie d'aller se rafraichir dans la Méditerranée devient irrésistible. Quand François m'a appelé pour me proposer une petite plongée crépusculaire après le boulot je n'ai pas hésité longtemps pour lui dire oui, tant pis pour la fatigue ! Je le rejoins à la calanque de Morgiou après l'ouverture de la barrière car l'accès à la calanque est bloqué pour les véhicules jusqu'à 19h. Par chance il n'y a pas encore beaucoup de touristes en cette fin de mois de juin et le petit port de Morgiou est tout à fait paisible. La vision de la grande bleue entourée de ces majestueuses falaises blanches, la senteur des pins et le chant des cigales, rien de tel pour couper des tracas du quotidien, je passe en mode "vacances j'oublie tout !"

A mon arrivée au cabanon, je retrouve François qui profite des derniers rayons de Soleil sur la terrasse. Il m'informe qu'à cause du vent qui a sévit ces derniers jours la mer s'est bien rafraichit. Du coup je ne vais pas faire le téméraire et j'enfile sans plus attendre la combinaison de 2 mm et le top de 1 mm. Une fois emmitouflé j'ai hâte d'aller à l'eau car avec toutes ces couches de néoprène je me retrouve dans une véritable étuve et je transpire à grosses goutes. Après une petite marche nous arrivons au bord de mer et je ne me fait pas prier pour rejoindre le monde de Neptune, je me plonge dans l'eau fraîche avec délectation ! François prend les devant, ce soir nous allons explorer la côte est de la calanque, celle qui mène à la fameuse grotte Bleue.

Nous parvenons jusqu'à un petit tombant de quelques mètres ou sont fixées quelques gorgones jaunes (Eunicella cavolini). Je descends les observer de plus près et je remarque au pied de l'une d'entre elle la petite outre d'une ascidie rouge (Halocynthia papillosa).

Un peu plus loin François m'indique un rocher où se trouve une jolie blennie pilicorne (Parablennius pilicornis) à la surprenante livrée dorée ! Cette coloration est très rare parmi les espèces de blennies européennes.

Cette couleur jaune est assez mystérieuse, il n'y a pas vraiment d'explication officielle au fait que certaines blennies pilicornes arborent parfois cette teinte. En tout cas il ne s'agit pas de la livrée de reproduction car cette dernière est noire ... 

Juste à côté je repère une blennie pilicorne en livrée classique, je lui tire le portrait histoire de pouvoir comparer son aspect avec celui de la blennie jaune. La différence est flagrante, pourtant il s'agit bien de la même espèce !

Avant d'aller faire un tour dans la grotte Bleue nous rendons visite à un beau tombant couvert de gorgones jaunes (Eunicella cavolini). Ce tombant richement orné mérite d'être visité en apnée, ici les gorgones forment une petite forêt d'éventails ramifiés.

 

Nous voilà en approche de la grotte Bleue dont l'entrée dépasse tout juste de la surface de l'eau.

 

A l'intérieur il fait déjà très sombre et la faune commence à s'activer en prévision de l'arrivée de la nuit. Dès l'entrée je repère une belle petite blennie à tête noire (Microlipophrys nigriceps). J'adore ce petit poisson très coloré qui fréquente les habitats obscurs. Ce spécimen présente une gorge jaune écarlate, il s'agit d'un mâle en livrée de reproduction. J'appelle François pour qu'il puisse venir l'observer tout en essayant de garder un oeil sur elle car ce poisson est très petit et on a vite faire de le perdre !

En fouinant parmi les gros rochers qui tapissent le fond de la grotte je repère une magnifique galathée bicolore (Galathea strigosa) reconnaissable à sa carapace rouge striée de lignes bleues. Celle-ci n'a pas l'air en très grande forme, normalement cette espèce a six pattes et deux très grandes pinces et j'ai la nette impression qu'il lui manque plusieurs membres. Espérons que ceux-ci réapparaitront à sa prochaine mue !

Je tente de m'approcher d'elle mais en l'éclairant avec le faisceau de ma lampe elle se met à reculer et elle semble vouloir aller s'abriter dans une fissure. J'essaye de descendre à son niveau pour la photographier en détails avant qu'elle ne disparaisse.

 

Pendant que j'observe la galathée je remarque la présence sur le fond de la grotte d'un petit corb (Sciaena umbra), en voilà une belle surprise !

J'essaye d'aller le voir de plus près mais il est difficile à photographier car il ne tient pas en place ... Le corb est une espèce protégée qui est classée comme vulnérable à l'UICN. La pêche et la chasse sous-marine de ce poisson est totalement interdite en France par un moratoire datant de 2014, au même titre que le mérou.

Depuis le fond de la grotte obscure je regarde en direction de l'entrée où l'étroite porte laisse encore passer un peu de lumière crépusculaire.

Sous les rochers je rencontre pas mal d'apogons communs (Apogon imberbis). Eux aussi sont assez farouches et ils jouent à cache-cache avec moi en disparaissant à chaque fois que j'oriente l'appareil photo vers eux.

En remontant vers la surface je note la présence d'une grosse ophiure lisse (Ophioderma longicaudum) qui glisse lentement sur les rochers. Il est assez rare d'en observer une qui évolue complètement à découvert.

Je m'approche d'elle pour la détailler. Cette grande ophiure possède de longs bras serpentiformes, elle se nourrit d'invertébrés cachés dans le substrat et qu'elle chasse la nuit.

 

Le long de la roi rocheuse je remarque une éponge qui se déplace doucement. Il s'agit de la couverture d'invisibilité d'une dromie (Dromia personata). Ce crustacé aime bien se camoufler en portant un énorme fardeau spongieux sur le dos.

 

Juste à côté de la dromie se trouvent quelques petites touffes d'hydraires sur lesquels de minuscules nudibranches rose-violet déambulent lentement. Il s'agit de coryphelles mauves (Edmunsella pedata). L'an dernier j'avais croisé peu de limaces de mer, mais cette année on dirait qu'elles sont de retour !

Voilà une nouvelle coryphelle mauve de plus grande taille, celle-ci est en train de déposer sa ponte sur une branche d'hydraire.

Alors que la visite de la grotte Bleue touche à sa fin et que nous nous approchons de la lumière extérieure, je découvre avec étonnement un doris dalmatien (Peltodoris atromaculata) fixé à la paroi.

C'est la première fois que j'observe cette espèce ici, c'est une belle surprise !

En inspectant les parties basses de la paroi rocheuse j'en découvre un autre qui se montre actif, il se déplace avec le panache branchial déployé.

François me convie à aller voir sur un petit surplomb à quelques mètres de profondeur et voilà que tombe nez à nez avec une langouste (Palinirus elephas).

Ce crustacé n'est pas franchement intimidé par ma présence, il fait preuve de curiosité et prend la pose devant mon Olympus TG4. C'est une belle rencontre ! Je rappelle que cette espèce est considérée comme vulnérable dans le statut de conservation UICN, aussi il faut éviter de la pêcher.

 

François m'incite à aller visiter une autre fissure vers six mètres de profondeur, cette fois-ci il a débusqué un jeune mérou brun. Malheureusement mes sinus sont devenus subitement douloureux et je n'ai pas pu aller l'observer. Je me suis consolé avec l'observation d'une rascasse qui attend l'obscurité sous un surplomb peu profond.

Comme je travaille le lendemain je n'ai pas pu prolonger la plongée en nocturne. Mais même courte, cette randonnée palmée crépusculaire était déjà bien intéressante et très réjouissante !

 

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La calanque de Morgiou

 

La calanque de Morgiou est située dans le Parc national des Calanques. Cette calanque encaissée abrite un petit port de pêche, quelques cabanons et un bar restaurant. Morgiou offre un cadre naturel magnifique, elle est sauvage et particulièrement paisible, l'eau y est souvent cristalline. L'accès en voiture y est réglementé en journée durant la période touristique entre le printemps et l'automne, seuls les résidents où les visiteurs ayant réservé une table au restaurant du petit port de pêche peuvent alors y descendre en véhicule.