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Petite plongée au Mugel sous le Soleil d'automne
Depuis quelques semaines nous sommes passés sans transition d'un été chaud et sec à un automne frais et humide. Mais après une longue période de grisaille voilà qu'une belle journée ensoleillée se présente enfin et je compte bien en profiter ! Comme çà fait un bon moment que je ne suis pas retourné plonger dans les calanques du Mugel, je vous propose une nouvelle fois de découvrir les fonds marins de ce superbe spot de la Ciotat.
Je n'ai qu'une heure devant moi pour explorer le site, c'est un peu court pour un spot aussi riche en recoins à visiter. Mais je vais essayer d'être efficace en allant directement voir les endroits les plus intéressants. La première surprise de cette sortie c'est la température de l'eau ! Alors que les prévisions annonçaient une mer à 18°C je m'aperçois qu'elle est bien plus fraiche que prévue : autour de 16°C ...
Avec une température pareille inutile de vous précisez que nous ne sommes pas nombreux dans l'eau. Les poissons ne sont pas dérangés ! Les premiers que je croise sont des castagnoles juvéniles (chromis chromis), de magnifiques petits poissons présentant des marques bleues électrique sur la tête et les nageoires.
Ce que j'adore au Mugel c'est qu'on y trouve une vie fixée particulièrement diversifiée. L'ascidie rouge (halocynthia papillosa) est un animal filtreur en forme d'outre qui ne passe pas inaperçue avec sa couleur sang intense.
Le violet à bouche rose (pyura dura) est un proche cousin de l'ascidie rouge. Cette espèce est beaucoup plus délicate à observer car elle est souvent couverte par d'autres organismes fixés. Seuls ses siphons rosés striés de fines lignes blanches sont clairement visibles.
Sous un promontoire rocheux je découvre un grand poulpe (octopus vilgaris) cramponné à la paroi la tête en bas.
Juste au dessous de lui se trouve une rascasse brune (scorpaena porcus) qui ne semble pas perturbée par sa proximité avec le gros céphalopode. Il faut dire que les rascasses sont généralement très confiantes vis à vis de leur capacité à se fondre dans le décors. Et quand bien même elle se ferait détecter elle possède des épines venimeuses acérées sur le dos pour se défendre !
Dans les zones obscures se cachent toujours de belles éponges colorées. Ici une oscarelle bleu-violet (oscarella lobularis).
L'oscarelle bleue contraste avec la couleur citrouille de l'éponge veineuse orange (spirastrella cunctatrix).
Une ophiure araignée (ophiopsila aranea) a trouvé refuge dans un creux de l'éponge encroutante. De son repère caché elle étend ses longs bras couverts de piquants pour capturer sa nourriture, de minuscules invertébrés ou des particules organiques qui passeraient par là.
Je continue mes explorations dans la calanque en visitant les rochers çà et là lorsque je tombe sur un jeune mérou brun (epinephelus marginatus) ! Quelle belle surprise, on en croise pas souvent en snorkeling en dehors des réserves marines intégrales. Le mérou brun est une espèce fragile qui a frôlé la disparition sur nos côtes à cause de la chasse sous-marine et de la pêche. Mais il semblerait que les mesures de protection strictes prises à son égard commencent à porter leurs fruits car des individus sont régulièrement croisés dans le parc des calanques. Je rappelle qu'à l’échelle internationale le mérou est protégé par la Convention de Berne de 1979 relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe et qu'en France un moratoire interdit sa pêche et sa chasse depuis 1993.
Voilà un témoignage de plus de la richesse des fonds marins du secteur formé par le Mugel, l'anse du Sec et l'île Verte. Il faudrait absolument y établir une réserve marine semblable à celle du Cap Rousset sur la Côte Bleue, cela permettrait de préserver sa biodiversité remarquable tout en constituant un attrait indéniable pour les baigneurs et les plongeurs. Une pétition pour la création de cette réserve marine existe, n'hésitez pas à la signer et la faire circuler ! Notre petit mérou emblématique de la Méditerranée vous remerciera !
Le temps défile et il commence à faire sombre dans une bonne partie de la calanque. J'observe un grand banc de saupes qui passe au loin devant moi.
Je retourne faire un tour du côté des grottes obscures un dernière fois. Et j'ai bien fait car je repère toute une population de doris dalmatiens (Peltodoris atromaculata) installés sur de éponges pierres.
Ils se faisaient rare au Mugel ces derniers temps, je suis content de voir qu'ils sont toujours présents.
Juste au dessus de moi une petite araignée de mer ridée (herbstia condyliata) me surveille du coin de l'oeil. Ce crustacé qui vit dans les zones obscures est aisément identifiable avec ses yeux rouges intense.
Sur les parois ombragées il est également possible d'observer des alcyons encroutants (alcyonium coralloides) aussi appelé faux corail rouge. Cet alcyonaire se développe en colonisant les ramifications gorgones dans les eaux profondes. près du bord on le rencontre sous sa forme digitée, elle ressemble alors à de petits lobes rouges couverts de polypes lorsque ces derniers sont déployés.
Il est malheureusement déjà temps de rentrer. En longeant les rochers je traverse de jolis bancs de castagnoles.
Alors que je nage en direction de la plage pour retrouver mes affaires, je survole une zone de fonds sablonneux. J'ouvre l'oeil au cas où un rombou (bothus poda) s'y cache. Ces poissons plats fréquents sur notre littoral sont des as du camouflage, la preuve ci-dessous : Le voyez-vous ?
Je fais une petite descente en apnée pour l'observer de plus près. Il s'est partiellement recouvert de sable, c'est pour cela qu'il est difficile à voir. Sur le bord du poisson certaines zones non masquées laissent entrevoir quelques petits motifs en forme de marguerites, c'est une marque de reconnaissance des rombous. Compte tenu de l'écart important entre ses deux yeux il s'agit très probablement d'un mâle.
Comme vous aurez pu le constater, même pour une petite sortie d'une heure ce spot est tellement riche en biodiversité qu'on est assuré de faire des observations intéressantes !
La calanque du Petit Mugel La calanque du Petit Mugel est située sur la commune de La Ciotat près du cap du Bec de l'Aigle et en face de l'île Verte. Le Mugel est une réserve naturelle qui offre un environnement minéral remarquable constitué de poudingues, des roches sédimentaires chargées d'anciens galets que la mer érode lentement, d'où la présence de nombreuses cavités à explorer en snorkeling.
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Commentaires
2Pascal LebrunSamedi 10 Octobre 2020 à 09:18Bonjour Laurent, les photos sont splendides ... magnifiques celles du poulpe et du mérou. J'en ai croisé quelques uns, toujours des jeunes, mais je n'ai jamais réussi à les photographier ils sont assez craintifs.
Encore merci pour ce reportage et bon WE.Bonjour à tout les deux !
@ Coyote13 : Oui elle a de beaux restes notre Méditerranée qu'on qualifie souvent de mer morte ! En fait on ne peut pas nier qu'elle est menacée de toutes parts mais il suffit de faire quelques efforts de préservation (limitation de la pêche et diminution de la pollution entre autres) pour que la biodiversité reprenne de l'allant. La preuve avec notre petit mérou mais aussi avec le violet à bouche rose qui a failli disparaître au début des années 2000 et que je recroise de temps en temps. On croise les doigts pour la réserve de la Ciotat mais il faudrait qu'elle prenne plus d'ampleur pour être présentée aux autorités compétentes.
@ Pascal : C'est super si tu as pu observer quelques petits mérous toi aussi, c'est bien la preuve que leur population remonte petit à petit ! C'est vrai qu'ils sont difficiles à photographier car ils sont souvent craintifs, mais il faut dire qu'ils ont été littéralement décimés et qu'ils ont gardé ce réflexe de fuite dans leurs gènes. C'est dommage car à la base les mérous sont des poissons plutôt placides et curieux. Peut-être qu'avec le temps et la création d'espaces protégés leur comportement changera.
En tout cas les scientifiques du parc des calanques ont également constaté durant le recensement de cette année que cette espèce reprend lentement de la vigueur sur plusieurs spots. Mais cette petite croissance est fragilisée par les actes de braconnage. Cette année des chasseurs peu scrupuleux ont été lourdement condamnés pour avoir mis à eux seuls en péril tout le travail de sauvegarde avec un véritable pillage des ressources naturelles du parc :
Les fanatiques de la gâchette sous-marine savent désormais à quoi s'attendre s'ils s'en prennent aux espèces protégées et qu'ils ne respectent pas les règlementations du parc !
4jeandefloretteSamedi 10 Octobre 2020 à 16:58Hello Laurent,
Magnifique! C'est peut être le bébé mérou que j'avais vu dans l'été... Et il aurait grandi sans problèmes. Pourvu que ça dure. Je vais peut être braver les 16° (hum) pour aller voir...
Merci du partage.
Salut André !
J'ai vu sur facebook tes belles images de la mer Rouge, c'est super que tu ais pu faire le voyage !
Je pense aussi que le mérou est le même que celui que tu as vu cet été. Il était dans le même coin que celui de la mostelle, coin que tu connais toi aussi. Le mérou était accompagné par un serran écriture qui lui a vite détalé. Le mérou lui n'était pas trop affolé j'ai eu le temps de le prendre en photo.
Si tu vas au Mugel çà va te faire un choc de passer de 26°C à 16°C ! Dans les grottes elle était même à 15°C ! Cette année je trouve que la température de l'eau a vite chuté.
A bientôt !
6thomasLundi 12 Octobre 2020 à 18:56Salut Laurent, encore de belles observations et photos, pas la peine d'aller en Catalogne pour voir des mérous en apnée ! Par contre effectivement dommage pour l'eau déjà très froide, j'ai rangé masque et tuba plus vite que je ne l'aurais voulu !
A bientôt !
Salut Thomas !
Oui j'ai pensé à toi avec cette eau froide, tu as bien fait de sortir avant l'épisode de refroidissement. Cette année le temps à vite tourné, les années précédentes la mer n'était pas descendue à 16°C avant la fin de l'automne ... Désormais il va falloir enfiler les couches de néoprène, la combi de 2 mm plus le surshorty de 5,5 mm pour moi.
par contre çà nous empêchera pas de faire un resto un de ces jours ;)
A bientôt
8thomasVendredi 16 Octobre 2020 à 16:27Salut Laurent, avec plaisir même si cea ne vas pas être simple d'organiser ça avec notre état de siège "sanitaire"...
A bientôt
Salut Thomas, effectivement faudrait faire çà un midi car le soir je sens que çà risque d'être foutu pour un moment ... S'ils nous confinent pas complètement d'ici peu !
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Salut Laurent,
Tes photos sont toujours aussi belles, quel plaisir de pouvoir contempler la faune méditerranéenne. Un vrai spécialiste du camouflage ce rombou et que dire de ce magnifique jeune mérou brun... Encore bravo et merci pour ces superbes clichés, en espérant que la pétition porte ses fruits et que dans un futur proche cette réserve marine puisse voir le jour.