• De l'île de l'Erevine au rocher du Moulon en kayak

    Je vous emmène cette fois-ci du coté des calanques cachées de la Côte Bleue, plus précisément entre Méjean et Niolon. Grande nouveauté pour cette sortie, je vais m'y rendre en kayak en pagayant en compagnie de mon ami Thomas qui aujourd'hui va me guider sur son embarcation vers des spots de snorkeling qu'il affectionne : L'île de l'Erevine et le rocher du Moulon.

    port de mejean

    Nous pagayons ferme pour sortir de la calanque de Méjean et tournons à gauche en direction de l'Erevine. Aujourd’hui nous avons de la chance, il fait très beau, pas un souffle de vent et la mer est d'huile, les conditions sont idéales pour une balade en kayak !  Après avoir longé les falaises ocres et puis blanches du littoral nous parvenons à l'île abrupte de l'Erevine où nous cherchons un rocher auquel amarrer l'embarcation.

    calanque de l'Erevine

    Nous trouvons un point d'attache sur le tombant nord de l'îlot. Si vous avez l'habitude de lire les comptes rendus de plongée de mon blog vous savez que les zones les moins exposées à la lumière du jour sont toujours les plus intéressantes à visiter. Par contre de ce côté là il n'y a pas beaucoup d'espace pour s'équiper, donc je vais imiter Thomas et plonger léger en short de bain et top néoprène. Allez, c'est partie pour un bon bain rafraichissant dans le grand bleu.

    A peine plongé dans l'eau, Thomas repère déjà un tout petit poulpe (octopus vulgaris) tapi dans les algues, çà commence bien ! Attention il est bien camouflé, l'avez-vous repérer sur la photo :

    poulpe

    Avant d'explorer le tombant plus en détail nous allons faire un tour sur le cap de l'île où les castagnoles (chromis chromis) et les bogues (boops boops) se réunissent en grands blancs. C'est très sympa de se retrouver entouré de dizaines de poissons !

    En ce moment l'eau est chaude (pas loin de 24°C) et les méduses prolifèrent. Il faut donc ouvrir l'oeil en nageant car il n'est pas rare d'en croiser. Voilà justement une pélagie (pelagia noctiluca) qui se présente face à nous.

    pelagia noctiluca 

    De retour sur le tombant ombragé je repère une blennie gattorugine (parablennius gattorugine) posée sur les rochers au milieu des moules.

    blennie gattorugine

     Le coin est riche en coralligène, on peut y observer pas mal d'éponges, d'ascidies et de bryozoaires.

    Dans cet enchevêtrement de couleur deux yeux inquiets m'observent. Voilà une blennie de Zvonimir (parablennius zvonimiri) qui scrute mes faits et gestes en se demandant s'il ne vaut pas mieux qu'elle retourne dans son trou ! 

    blennie de zvonimir

    Au pied du tombant entre 6 et 10 mètres j'entrevois un beau massif de gorgones jaunes (eunicella cavolini). Malheureusement sans mes palmes et sans mon lestage je ne parviens pas à les approcher correctement. Mais ce n'est que partie remise car pour la cession suivante au rocher du Moulon je devrais pouvoir enfiler mon équipement et d'après Thomas là bas il y en a aussi. 

    En repartant vers le kayak je tombe à nouveau sur un poulpe. Celui-ci est blotti dans son repère, il m'observe attentivement avec un mélange de curiosité et de crainte. J'adore ces animaux, chaque rencontre avec eux est différente et au travers des interactions on sent bien qu'ils ont une sensibilité.

    poulpe

    Nous quittons l'île de l'Erevine et pagayons désormais en direction du rocher du Moulon. La presqu’île du Moulon présente sur sa face nord une grande falaise qui a la particularité d'être déversante, c'est à dire que sa pente est tellement érodée à sa base qu'elle est désormais parfaitement concave.

    rocher du Moulon

    Pour explorer le tombant nord du Moulon j'ai pu cette fois-ci enfiler mon équipement complet et surtout ma combinaison de 2 mm qui va m'être utile pour me protéger des nombreuses méduses pélagies qui se sont amassées dans ce coin. Je rejoins la falaise ombragée et commence mes explorations en m'aidant de l’éclairage de la lampe Qudos Action. Le premier animal rencontré parmi les rochers est un poulpe. Sa peau se couvre de protubérances à mon approche afin d'imiter les algues environnantes et tenter de passer inaperçu.

    poulpe

    De nombreuses hervias (cratena peregrina) fréquentent ce tombant particulièrement riche en hydraires. Nous sommes dans un très bonne année pour observer cette espèce qui est particulièrement abondante sur notre littoral en cette fin d'été !

    hervias

    En arpentant attentivement la paroi je tombe sur une étrange structure coulante qui attise la curiosité : Il s'agit en fait d'une éponge rognon (chondrosia reniformis) qui possède un mode de reproduction asexué par coulure. En effet, l'éponge  émet un gros filament en forme de goutte au bout duquel un corpuscule finira pas se détacher et constituer un nouvel individu.

    éponge rognon

    Depuis la surface je repère toute une forêt de gorgones jaunes (eunicella cavolini) fixées vers la base du tombant. Je descends leur rendre visite pour les observer de plus près et je me rends compte avec bonheur qu'elles sont en bonne forme car elles présentent de nombreux polypes déployés.

    Les gorgones jaunes sont magnifiques, elles constituent d'ailleurs l'une des grandes attractions du rocher du Moulon. La richesse de ce spot fait qu'il est assez réputé dans les clubs de plongée bouteille de la Côte Bleue. 

    gorgone jaune

    L'amateur de nudibranches y trouvera également son bonheur car en auscultant attentivement le coralligène il est possible de croiser d'autres espèces que les traditionnelles hervias. J'ai notamment pu surprendre cette belle flabelline mauve (flabellina affinis) dont le corps semi transparent laisse entrevoir les dizaines d'oeufs roses qu'elle s’apprête à déposer sur les branches d'un eudendrium !

    flabelline mauve

    Par contre il y a peu de poissons dans le secteur ombragé en dehors d'un serran chevrette que je n'ai pas pu approcher et de quelques triptérygions.

    Le triptyque classique des nudibranches devient complet lorsque je finis par débusquer une petite calmella (calmella cavolini). Les hervias, les flabellines mauves et les calmellas sont les trois espèces que je croise le plus fréquemment. 

    calmella

    Une étoiles de mer rouge (echinaster sepositus) déambule lentement sur les rochers. Celle-ci ressemble pas mal à une autre espèce, l'étoile de mer lisse, car elle ne présente pas beaucoup de papules foncées à sa surface et sa couleur vire au orange. Mais l'étoile de mer lisse présente une surface plus soyeuse et les petites cavités foncées qui la recouvre forment des rangées parfaitement alignées, ce qui n'est pas vraiment le cas de mon spécimen.

    étoile de mer lisse

    La petite nouveauté de la sortie au niveau des limaces de mer c'est que j'ai pu apercevoir parmi les algues vertes une minuscule "brindille" blanche qui changeait de place. Après l'avoir photographié elle a malheureusement rapidement disparu dans le décors, du coup je n'ai pas eu le temps de vraiment régler le zoom du TG4. Mais l'image que j'ai eu le temps de faire est suffisamment bonne pour identifier une trapanie à lignes blanches (trapania lineata). C'est la première fois que j'observe cette espèce.

    trapanie à lignes blanches

    Pour finir je jette un dernier coup d'oeil aux hervias et je m'en vais rejoindre Thomas au kayak.

    hervia

    Nous quittons la presqu'île du Moulon et son formidable tombant pour retourner vers le port de Méjean. Un grand merci Thomas pour m'avoir proposé cette agréable sortie en kayak, j'ai vraiment passé un très bon moment en ta compagnie ! C'est toujours plaisant de partager au grand air notre passion commune pour la nature et pour notre magnifique littoral. Et à bientôt pour de nouvelles aventures sous-marines !

    rocher du moulon


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  • Commentaires

    1
    jeandeflorette
    Lundi 14 Septembre 2020 à 16:11

    Super, cet endroit! Belles gorgones et un nouveau nudi dans la collection. Bravo!

    2
    Lundi 14 Septembre 2020 à 16:55

    Salut André ! Oui un bel endroit, surtout connu des clubs locaux de plongeurs bouteille qui ont accès à un bateau (on en a croisé pas mal le matin en pagayant, on voyaient régulièrement de grosses bulles remonter du fond). A pied il faut une bonne marche à partir de Mejean pour y accéder, çà me paraît compliqué à faire avec le paquetage et les poids de lestage ...

    Sinon je trouve que c'est une bonne saison pour observer les nudis, les hervias, les flabellines et les calmellas sont nombreuses et j'ai même droit à une petite nouveauté de temps en temps. Par contre je ne croise quasiment pas de doris, ni de dalmatiens ni de célestes ... C'est bizarre.

    En tout cas çà m'a fait plaisir de voir des gorgones en pleine forme car j'ai trouvé celles de l'Anse du Sec en piteux état.

      • jeandeflorette
        Jeudi 17 Septembre 2020 à 12:03

        C'est vrai pour les gorgones de l'anse du sec.... Par contre j'en ai vu de magnifiques  vers Callelongue . Pour les dalmatiens, j'en ai vu fin juin au Mugel puis plus rien... Bizarre, en effet.

    3
    Vendredi 25 Septembre 2020 à 00:05

    Salut André ! je suis tombé sur un commentaire de Laurent Ballesta à propos des réserves marines et que tu pourrais rajouter sur la page de la pétition pour avoir plus de réserves :

    Les sites protégés : une arme de repopulation massive

    Les réserves naturelles intégrales « équivalent à des têtes d’épingle en France », déplore Laurent Ballesta. Il aimerait en voir plus « car il suffit d’une dizaine d’année pour qu’elles se repeuplent au maximum, comme on peut l’observer ». Et cela bénéficie à tout le monde selon lui, « car ce repeuplement déborde de la réserve. Les pêcheurs en bordure se régalent ».

    « Mais il faut une vingtaine d’année pour créer des sites protégés. Et une fois que c’est fait, c’est beaucoup plus rapide pour les agrandir ». Le plongeur biologiste cite notamment les réserves naturelles de Banyuls, Port-Crau ou Scandola. Très longues à mettre en place, leurs bénéfices écologiques sont impressionnants. « Un site protégé se régénère en moins de temps qu’il n’en faut pour le créer ».

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    4
    Samedi 10 Octobre 2020 à 10:13

    Bonjour Laurent,yes

     

    Beau reportage illustré par de splendides photos.

     

    Je ne connaissais pas ‘la coulante’ …l’éponge rognon.

     

    Tes gorgones jaunes me rappellent celles que j’ai rencontrées  Iles Medes ( ou Medas) Costa Brava

     

     

    ‘…vous savez que les zones les moins exposées à la lumière du jour sont toujours les plus intéressantes à visiter.

     

    Oui mais les zones bien exposées permettent de faire de belles photos d’ambiance montrant les fonds sous-marins…et d’espérer rencontrer des espèces qui patrouillent.

     

     

    Bravo…toujours agréable à lire.

     

    5
    Samedi 10 Octobre 2020 à 11:23

    Salut !

    Merci pour ton message :).

    En ce qui concerne les zones bien éclairées je m'en sers aussi pour faire des photos d'ambiance et je vais toujours y faire un tour. Mais ici beaucoup de fonds sont assez quelconques sur les façades exposées à la lumière et çà tourne vite à l'ennui, çà va être une enfilade de roches couvertes d'algues rases.

    Pour cette sortie à l'Erevine j'ai quand même eu droit à quelques bogues au milieu des castagnoles du côté ensoleillé de l'île, çà change un peu. Mais d'une façon générale les zones éclairées sont surtout intéressantes quand on se trouve à proximité des réserves pour espérer croiser des dorades, des dentis ou des loups. Par exemple les fonds éclairés de Port Cros était vraiment grouillant de vie et çà a donné de belles images.

    Sinon on aura évidemment de belles zones ensoleillées à explorer dans les mers tropicales mais ma remarque ne les concernait pas.

     

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